Back to Top

Avant 1967

Dessin de l'architecte J.A.Godin, paru dans La Presse en 1913Le Théâtre Dominion a été dessiné en 1913 par l'architecte Joseph-Arthur Godin (1879-1949). Sur le croquis de la façade avant, publié dans La Presse la même année, on peut toutefois lire qu'il aurait dû s'appeler Le Jovial, nom prédestiné s'il en est. La construction commença en septembre 1913 et l'ouverture du Théâtre Dominion eut lieu en avril 1914. A l'origine, la salle était conçue pour n'être qu'une salle de projection de vues animées, mais avec l'avènement de l'âge d'or du burlesque, les présentations se diversifièrent.

 

Dans cette salle sans coulisses et sans loges, entre des vues de Harold Lloyd ou de Buster Keaton (pour n'en citer que deux), les artisans du burlesque québecois se bousculèrent dès 1932 créant des spectacles variés et fort populaires. Voici à peu près comment se passait une journée dans la vie de ces gens-là :    Vers midi, courte répétition. À treize heures trente, premier spectacle au Cartier, rue Notre-Dame à St-Henri. Aussitôt la représentation terminée, départ pour le Dominion où le prochain spectacle est à seize heures. Puis, retour au Cartier pour le show de dix-huit heures trente avant de revenir au Dominion pour celui de vingt heures. Finalement, dernier retour au Cartier pour le spectacle de fin de soirée. Le tout, bien sûr, avec décors et accessoires!  :o) (Ref. Juliette Pétrie / Chantal Hébert)

 

C'est en 1929 que Le Dominion passa des vues animées au cinéma parlant, comme de nombreux cinémas. Peu à peu, le répertoire filmographique ainsi que les habitudes des spectateurs changent, de même que la vocation du Dominion. Le burlesque étant un peu en déclin dans les années 50 (certains blâment l'arrivée de la télévision), le Dominion redevient uniquement un cinéma jusque vers 1965. Pendant un peu plus d'un an, la salle fut ensuite convertie en église par les Témoins de Jéhovah, répertoriée dans l'annuaire sous le nom d'Emmanuel Church. Durant ce temps, la fosse d'orchestre servait de bain pour les baptêmes!

 

En 1966, il changea de nom et de propriétaire pour devenir Le Figaro, pour quelques mois seulement avant que Gilles Latulippe n'en fasse enfin l'acquisition pour y faire revivre les grandes heures que cette salle avant connu jadis. Le Dominion va revivre à travers le Théâtre des Variétés ses grandes soirées film et spectacle. Non, le burlesque n'était pas mort.

 

Petit fait amusant à noter en passant: si le bâtiment en lui-même ne s'est pas déplacé, son adresse civique a néanmoins changé plusieurs fois à mesure que Montréal s'agrandissait.  A l'ouverture en 1914, il était situé au 820-22 avenue Papineau.  En 1922, il changea pour le 1676-78 de la dite avenue. Ce n'est qu'en 1926 que le 4530 avenue Papineau lui fut définitivement attribué.

 

Parallèlement, alors que le numéro civique grandissait, le nombre de places diminuait...  De plus de 1500 sièges annoncés en avril 1914, il n'y en avait plus que 908 en 1927. A cause des nouvelles dispositions de sécurité implémentées suite à l'incendie dramatique du Laurier Palace, le Dominion fut fermé au début de 1928 pendant plusieurs mois et à sa réouverture, le nombre de sièges était passé à 829. La capacité du Théâtre des Variétés jusqu'à sa fermeture en 2000 était de 727 places.

 

Parmi les faits divers des journaux du temps, j'ai retracé un vol par effraction au Dominion en mai 1919. Puis, en novembre 1921, un début d'incendie dans la cabine de projection (les pellicules au nitrate s'enflammant facilement) rapidement maîtrisé par les bons réflexes de l'opérateur.  Selon les pompiers, le fait que la cabine de projection ait été doublée d'amiante a évité une catastrophe, le théâtre étant plein au moment de l'incident. Le propriétaire, M.Lawand, et son frère, tous deux propriétaires et gérants de plusieurs salles, sont souvent cités dans les chroniques judiciaires du temps pour des mésententes, parfois violentes, avec certains de leurs employés où pour des infractions aux lois, principalement le nombre et l'âge autorisé des spectateurs. Le plus grave de ces faits étant incontestablement l'incendie du Laurier Palace.